Le Contrat – Notion – Définition de Jacques Ghestin

La notion de contrat

Jacques GHESTIN : la notion de contrat

Le contrat est un accord de volontés, qui sont exprimées en vue de produire des effets de droit : un accord de volontés.


Cet accord de volontés doit être destiné à produire des effets de droits, condition nécessaire pour donner auxvolontés leur pleine signification.

Mais il faut apporter deux précisions importantes :

  • tout contrat exige essentiellement le concours de deux ou plusieurs déclarations de volontés.
  • Ensuite et surtout, l’accord des volontés ne produit des effets de droit que parce que le droit objectif lui reconnaît un tel pouvoir et dans les limites définies par celui-ci.

Cette définition laisse à l’accord des volontés son rôle spécifique dans la création d’effets de droit. Mais l’antinomie ainsi reconnue aux parties, qui sont autorisées à régler elles mêmes, par leur accord, leurs relations, n’est pas indépendance, ni souveraineté.

Elle ne s’exerce que dans les limites plus ou moins étroites des compétences qui leur sont reconnues par le droit objectif.


La question est celle de savoir ce qu’est un contrat.


Sur le plan proprement juridique, la notion de contrat est relativement ancienne. On connaît en effet, l’évolution qui, à partir des contrats nommés, formalistes et concrets du droit romain, a conduit à l’élaboration d’une théorie du contrat par DOMAT et POTHIER, qui ont en même temps orienté le code civil vers une conception «volontariste du contrat ».


Conclure un contrat, une convention, c’est se mettre d’accord sur quelque chose. Le contrat est classé dans les actes juridiques (AJ).


I/Le contrat est un accord de volonté

A. Le fondement de la force obligatoire du contrat


La théorie de l’autonomie de la volonté a dominé l’enseignement des contrats depuis le début du siècle.

  • il est aujourd’hui permis, après avoir écarté la théorie classique de l’autonomie de la volonté, de proposer un fondement de la force obligatoire (FO) du contrat qui est déduit de l’utilité et la conformité du contrat à la justice.


L’autonomie de la volonté entendue comme l’exercice d’un pouvoir souverain parallèle et concurrent à la loi, semble bien aujourd’hui, être écartée par la plupart des auteurs.

  • elle est en tout cas incompatible avec l’état actuel du droit positif
  • en revanche, une fois écartée la volonté des parties comme pouvoir souverain (fondement de la FO des contrats), rien n’interdit de reconnaître une certaine compétence octroyée aux volontés individuelles, afin qu’elles fixent elles mêmes les règles qui régiront leurs relations particulières pour une opération juridique déterminée.
  • donc il est possible de parler d’une certaine autonomie de la volonté, indissociable d’une certaine liberté contractuelle.

Mais il faut se demander ce qui justifie cette autonomie, en tant qu’octroi d’une certaine compétence reconnue aux volontés individuelles dans l’agencement de leurs relations.

  • c’est de cela que vont se déduire les limites d’une liberté.
  • pour préciser le fondement des justes limites de l’exercice ce cette liberté des volontés individuelles, on va alors se référer à des valeurs fondamentales et affirmer que le fondement de la FO reconnue au contrat par le droit positif, se déduit de son utilité sociale et de sa conformité a la justice contractuelle.

L’accord de la volonté des parties conserve un rôle important à raison de sa propre utilité sociale.

B. L’accord des volontés critère du contrat


La création de règles juridiques par un accord de volonté apparaît comme le droit commun de tous les contrats : ce qui caractérise le contrat, c’est d’être à la fois un accord de volonté et de se voir reconnaître le pouvoir de créer des effets juridiques par le droit objectif.


L’accord des volontés reste donc le critère du contrat qui peut être entendu de façon souple :

  • la volonté n’est donc pas le fondement de la FO du contrat.
  • il n’y a pas d’inconvénient à tenir pour contractuelle toute obligation née d’un accord de volontés, même si celle-ci n’en a pas déterminé le contenu.
  • en principe seule le volonté active, exprimée peut faire naître un contrat→ mais quelque soit la forme sous laquelle se manifeste la volonté de chacune des parties, il suffit qu’elle fasse naître chez son destinataire l’attente raisonnable d’un véritable engagement.
  • de même l’absence de négociation ne suffit pas à écarter la qualification de contrat, de même qu’elle ne suffit pas à justifier cette qualification : la négociation n’est donc pas le critère du contrat.
  • l’essentiel : il faut un accord de volonté – le contrat ne peut pas naître d’une décision unilatérale, même si dans certains cas le poids d’une volonté a pesé plus lourdement , et que le consentement de l’autre partie a été fait de beaucoup de résignation.

La question est alors de savoir à partir de quel degré de contrainte la volonté d’une des parties doit se voir refuser toute valeur obligatoire ?

  • dans ce cas il n’y a pas de contrat car il y a absence d’accord de volonté réel.

Toutefois, tout accord de volontés n’est un contrat que lorsqu’il est destiné à produire des effets de droit.


II/ Le contrat est destiné à produire des effets de droit


A. Le contrat doit produire des effets de droit


Pour qu’un accord soit vraiment un contrat, il faut qu’il ait été conclu en vue de produire des effets juridiques.

  • donc beaucoup d’accords sont en dehors du domaine du droit et ne comportent pas de sanctions juridiques : ils appartiennent au non droit.
  • d’autres accords ne sont plus des contrats car ils sont dépourvus de caractère obligatoire.

Une fois formé par un accord des volontés, le contrat ne peut plus être modifié par un nouvel accord.

  • les volontés de chacune des parties ne peuvent en écarter unilatéralement l’exécution ou en changer les termes.
  • ce principe de la FO du contrat posé à l’art 1134 est toujours fermement affirmé par la jurisprudence : mais le législateur ou le juge, avec la permission de la loi ou sous couvert d’une interprétation déformante du contrat, peuvent modifier ce dernier.

Une question se pose alors : un contrat dont l’une des parties peut modifier substantiellement le contenu de façon unilatérale mérite-t-il encore cette qualification ?

  • dans la mesure où il y a un accord de volontés à l’origine d’une situation comportant des effets juridiquement obligatoires, le fait que ces effets (selon les dispositions expresses ou tacites de cet accord de volontés) puissent être modifiés par l’une des parties ne change pas la qualification de contrat (dès l’instant cependant que cette faculté n’autorise pas cette partie à se libérer en fait de toute obligation réelle)

B. Le contrat est-il limité à la production de certains effets de droit ?


La qualification de contrat doit-elle être réservée aux contrats valables ? Aux échanges économiques ? Aux accords de volontés qui ne font pas naître une institution ou un statut ? : Il semble que non.

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