LA SOLIDARITE EN DROIT CIVIL – PARTIE 3 – 2

2) Les effets de la solidarité passive


Il existe, traditionnellement deux types d’effets à la solidarité passive : les effets principaux et les effets secondaires qui rendent encore plus lourde la charge de la solidarité pour les débiteurs en facilitant l’action du créancier. On distingue, dans les effets principaux, ceux qui concernent les relations des débiteurs avec le créancier et ceux relevant des relations des débiteurs entre eux.

Pour les premiers, le postulat étant celui d’une unicité de dette avec une pluralité de débiteurs, il découle de la solidarité que le créancier a le droit de tout réclamer à l’un quelconque des débiteurs et que la libération de l’un libère les autres (libération par le paiement, la novation ou la remise de dette suivant les modalités de l’article 1285 alinéa 1). De la pluralité de débiteurs à la dette, il se déduit que le décès de l’un entraîne la division de la dette entre ceux qui restent (article 1210) et que les débiteurs peuvent invoquer au créancier tous les moyens de défense communs (comme la paiement, la nullité, le vice de forme) ainsi que les exceptions simplement personnelles (comme la remise de dette accordée à un seul débiteur pour sa part ou l’extinction de créance pour défaut de déclaration dans une procédure collective) qui permettront, pour ces dernières, une diminution de la dette de la part du débiteur libéré. Néanmoins, chaque débiteur ayant un rapport juridique propre avec le créancier, les autres ne pourront invoquer les exceptions purement personnelles comme l’incapacité ou le vice de consentement. Par contre, les relations des débiteurs entre eux ne sont pas marquées par la solidarité mais par la division de la dette (article 1213) donc sauf stipulations contraires, le mode de répartition de la contribution sera par parts viriles. Le débiteur qui a payé pour le tout dispose de deux sortes de recours pour assurer la contribution définitive de chacun à la dette (1214 alinéa 1), soit un recours personnel soit l’exercice de l’action même du créancier auquel il est subrogé (article 1251).
Néanmoins, cette subrogation n’est pas parfaite puisque le débiteur, s’il bénéficie des sûretés du créancier, ne bénéficie pas de la solidarité entre les autres.


Ce sont surtout les effets secondaires de la solidarité passive qui lui confèrent tout son intérêt. La vigueur de ces effets, s’explique d’ailleurs traditionnellement par l’idée de représentation mutuelle des débiteurs, l’acte fait contre l’un aurait effet contre les autres et l’acte fait par l’un engagerait les autres ; idée dont la source se trouve dans l’existence de cette communauté d’intérêts. Ainsi, selon les dispositions du Code civil, il suffit au créancier d’agir contre un codébiteur pour qu’à l’égard de tous, la prescription soit interrompue (article 1206), que les intérêts courent (article 1207) et que la mise en demeure soit faite (article 1205). La jurisprudence a poussé encore plus loin les effets attachés à la représentation mutuelle. Ainsi, a-t-elle décidé, contrairement au principe d’autorité relative de la chose jugée, que le jugement rendu dans un procès entre le créancier et un codébiteur a autorité de la chose jugée à l’égard des autres (Civ 28/12/1881). Il existe aussi une certaine représentation mutuelle des débiteurs solidaires en matière de voies de recours mais plus limitée puisque son seul effet, néanmoins très dérogatoire, sera de permettre aux codébiteurs de se joindre à une voie de recours exercée par l’un d’eux même après expiration du délai. Ainsi aussi, en matière de transaction, il est possible aux codébiteurs d’invoquer la transaction entre le créancier et l’un d’eux si elle leur profite (Civ 27/10/1969).


Ainsi, en matière de solidarité familiale et d’autant plus de solidarité passive dans le régime des obligations, les effets conférés à cette aide mutuelle sont très puissants. Cette force s’explique par l’idée d’une réelle communauté d’intérêts, voulue ou découlant de la relation des débiteurs entre eux. Il n’en est pas de même pour certaines hypothèses de solidarité prévues par la loi ou la jurisprudence, qui parce qu’elles ne reposent pas sur ce fondement de communauté, ont des effets beaucoup plus limités.

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