Les Circonstances Aggravantes en droit pénal – Notion

Victor HugoLa circonstance aggravante ne doit pas être confondue avec les éléments constitutifs de l’infraction. Le juge va contrôler l’élément légal, moral et matériel de l’infraction. Quand il va s’intéresser quant à la hauteur de la répression, il va chercher des circonstances aggravantes. Elles interviennent uniquement pour moduler la hauteur de la répression de l’infraction. Elles ne sont donc pas spécifiques à une infraction, elles transcendent les incriminations particulières. Ex : la bande organisée pour le vol et les actes de torture et de barbarie.

On constate qu’elles se multiplient. Ex : homophobie, feu de forêt, violences conjugales (en discussion à l’Assemblée Nationale). En plus de se multiplier, on constate un renforcement du régime découlant des circonstances aggravantes. Ex : loi du 12.12.05 qui renforce la répression applicable au récidiviste. Perben II met en place une procédure dérogatoire en présence de la bande organisée.

Le problème se pose de savoir si l’intervention du droit pénal n’est pas aujourd’hui davantage gouvernée par les circonstances aggravantes que par les incriminations particulières.

I/ Diversification des circonstances aggravantes

A – Diversification quant à leur domaine

  • Diversification du domaine des circonstances aggravantes générales

Définition : c’est une circonstance aggravante qui accompagne toutes les infractions sauf prévision contraire du législateur. Les infractions susceptibles d’être aggravées par la récidive sont de plus en plus nombreuses. Elle s’applique de manière générale à toutes les infractions du code pénal sauf aux contraventions des quatre 1ère classes. La loi du 12.12.05 vient encore élargir son domaine par deux dispositions nouvelles :

– la récidive peut être constituée lorsque la 1ère condamnation a été prononcée par les juridictions répressives d’Etats membres de l’UE

– elle a créé deux nouvelles séries d’assimilation pour les délits : Apparition d’une nouvelle circonstance aggravante générale : la loi du 21.06.04 relative à la confiance dans l’économie numérique a inséré une nouvelle circonstance aggravante générale à l’art 131-79 du CP, l’utilisation d’un moyen de cryptologie.

  • Diversification du domaine des circonstances aggravantes spéciales

Définition : les circonstances aggravantes qui ne sont susceptibles de s’appliquer que dans la mesure où le législateur les prévoit expressément infraction par infraction.

Elles accompagnent des infractions de plus en plus nombreuses. Ex : Perben II étend largement le domaine d’application de la bande organisée, la loi du 17.06.98 étend largement le domaine d’application de celle de mineur délinquant.

Il est très rare aujourd’hui de rencontrer une infraction sans circonstances aggravantes. Certaines sont tellement fréquemment prévues par le législateur qu’on retrouve leur définition dans les principes directeurs du droit pénal en tête du code pénal. Ex : art 131-71 définit la bande organisée.

De même, on en arrive aujourd’hui à désigner un comportement par sa circonstance aggravante plutôt que par sa qualification originelle.

B – Diversification quant à leur nature

  • Constat de la diversification des circonstances aggravantes

Trois catégories de circonstances aggravantes :

– les circonstances aggravantes réelles : circonstances aggravantes objectives. Ce sont celles qui tiennent à la matérialité de l’infraction. Ex : usage d’une arme, effraction, mineur victime.

– les circonstances aggravantes personnelles : circonstances aggravantes subjectives. Ce sont celles qui tiennent à la personne de l’auteur de l’infraction. Ex : récidive, exercice d’une profession ou fonction déterminée.

–  les circonstances aggravantes mixtes : ce sont celles qui tiennent à la fois à la matérialité de l’acte et à la personne auteur de l’infraction. Ex : préméditation, toutes les circonstances qui supposent la poursuite de certains mobiles (racisme).

Exemple de la distinction entre bande organisée et réunion : ce sont deux causes d’aggravation réprimant, à quelques nuances près, la même chose : la collectivité de l’infraction.

Sous l’infraction de violence, il y a 15 circonstances aggravantes spéciales.

  • Causes de cette diversification

La tendance actuelle du législateur est d’ériger des infractions autonomes en circonstances aggravantes d’une autre infraction. Ex : loi du 12.06.03 avec le fait de conduire en état d’ivresse, l’excès de vitesse qui sont des circonstances aggravantes du délit d’homicide involontaire.

Aujourd’hui, dès qu’un intérêt nouveau à protéger apparaît, le législateur créé des circonstances aggravantes au lieu d’incriminer. Ex : feu de forêt.

II/ Renforcement du régime des circonstances aggravantes

A – Quant à la teneur de la répression

  • Effet des circonstances aggravantes sur la déclaration de culpabilité

Admission par la jurisprudence de la théorie des circonstances aggravantes putatives c’est-à-dire celles qui ne sont pas produites mais qui airaient pu se produire. Pour la tentative, la jurisprudence retient ces circonstances comme cause d’aggravation de la répression. Dérogation faite à la déclaration de culpabilité unique pour les circonstances aggravantes. Elles peuvent accompagner plusieurs infractions différentes. Elles peuvent avoir une incidence sur la déclaration de culpabilité.

La jurisprudence affirme certes solennellement qu’un même fait ne peut être retenu comme constitutif à la fois d’une infraction, crime ou délit, et d’une circonstance aggravante accompagnant une autre infraction (crim 14.10.54).

Cependant, la jurisprudence admet aussi qu’une même circonstance aggravante peut être relevée comme aggravant des crimes ou délits distincts : il a ainsi été jugé que la vulnérabilité de la victime pouvait être retenue comme circonstance aggravante à la fois d’un viol et de violences volontaires (crim 14.02.90).

Les conséquences du principe de l’assimilation du complice à un auteur. Le complice ne commet pas l’infraction mais participe à sa commission. L’art 121-6 du CP pose le principe d’assimilation du complice à un auteur. Ce principe signifie que le complice sera puni comme s’il était lui-même l’auteur de l’infraction. Il se distingue ainsi du système de l’emprunt de pénalité qui avait cours sous l’ancien code pénal. Ce système emporte plusieurs conséquences :

– les circonstances aggravantes personnelles à l’auteur principal n’aggravent pas la peine encourue par le complice (ex : récidive légale, meurtre sur ascendant…). Ainsi, le complice de celui qui tire sur son père encourt les peines de meurtre simple et non celles du meurtre aggravé. Inversement, les causes d’atténuation de peine personnelles à l’auteur (minorité, démence…) ne bénéficient pas au complice.

– Les circonstances aggravantes réelles (relatives à l’infraction elle-même) se communiquent au complice (ex : la réunion, la violence, l’usage d’une arme…)

– Les circonstances aggravantes personnelles au complice : le complice peut voir sa peine aggravée par des circonstances qui lui sont personnelles et qui ne concernent pas l’auteur principal. Le fils qui fait tuer son père par un tiers encourt les peines du meurtre aggravé alors que l’auteur principal encourt les peines du meurtre simple.

Un problème se pose quand une personne est complice d’une infraction qu’elle ne pouvait juridiquement pas commettre elle-même. Par exemple, une qualité propre à l’auteur principal est un élément constitutif de l’infraction principale (infraction commise par un fonctionnaire), une femme aide à un viol… Dans de tels cas, la chambre criminelle décide que « la circonstance que la qualité personnelle de l’auteur de l’infraction est un élément constitutif et nécessaire de celle-ci n’exclut en rien la complicité des tiers » (crim 21.05.96).

  • Effet sur la peine

Elles ont pour effet d’accroître le taux de la peine encourue.

Elles génèrent une aggravation de plus en plus lourde de la répression. Ex : Perben II augmente le taux encouru en matière de bande organisée lorsque déjà prévu avant.

Elles jouent également sur l’exécution des peines. La loi du 12.12.05 renforce considérablement les conséquences de la récidive. Ex : aménagement du SME, amoindrissement du crédit de réduction de peine, accès plus difficile à la liberté conditionnelle, application de deux nouvelles mesures de sûreté, placement sous surveillance électronique mobile, surveillance des personnes dangereuses.

B – Quant à la  mise en œuvre de la répression

  • En Droit Pénal général

Application de la loi pénale dans l’espace : elle peut être déterminante en matière de conflit de lois dans l’espace. Art 113-1 : la loi française est applicable à toutes les infractions sur le territoire dès lors qu’un fait constitutif de l’infraction est commis sur ce territoire. La jurisprudence considère qu’une circonstance aggravante peut être considérée comme un fait constitutif de l’infraction. Elles sont parfois des outils de correctionnalisation ou de criminalisation judiciaire.

  • En procédure pénale

Elle est parfois déterminante de la prescription publique. De l’existence d’une simple circonstance aggravante dépend parfois la mise en œuvre de procédures dérogatoires au droit commun.

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