Citons à titre d’exemple, pour introduire ce sujet, deux auteurs. Ils vont nous éclairer sur le géant “Administration” tel qu’il peut être perçu d’un oeil lointain ou avisé:
Jean Freyssinet nous en parle en ces termes : « Enfermée dans sa tour d’ivoire l’administration évoque un monde de papiers, de lenteur et souvent d’oppression.»
Alexis de Tocqueville quant à lui affirme : « Sous l’Ancien Régime comme de nos jours, il n’y avait ville, bourg, village, ni si petit hameau en France, hôpital, fabrique, couvent ni collège, qui pût avoir une volonté indépendante dans ses affaires particulières, ni administrer à sa volonté ses propres biens. Alors comme aujourd’hui, l’administration tenait donc tous les Français en tutelle. »
En héritage de l’ère napoléonienne, l’administration est communément vue comme un organe puissant et obscur qui impose ses actes aux citoyens, assujettis à sa volonté, sans qu’ils puissent, par quelque moyen que ce soit, s’y opposer.
De prime abord, donc, pour celui qui est étranger au droit administratif, empêcher l’exécution de l’acte administratif semble vain.
Préalablement à tout développement, il conviendra de définir l’acte administratif.
- De manière générale, les actes juridiques englobent toutes les manifestations de volonté en vue de produire des effets de droit.
- Au sens générique, l’acte administratif est un acte juridique fait dans le cadre et pour l’exécution d’une opération administrative. Bien souvent, parce que l’imperium est plus important en droit administratif, on réserve l’expression d’« acte administratif » pour désigner l’acte unilatéral.
L’acte unilatéral est le procédé normal de l’action administrative. Comme son nom l’indique, il est émis unilatéralement par l’administration et a pour objet de conférer des droits et d’imposer des obligations aux administrés. On s’aperçoit donc qu’à la différence des relations juridiques en droit privé, fondées sur le consentement des parties, l’acte administratif unilatéral traduit l’inégalité des relations administrations-administrés
.Mais à l’heure du tout contractuel, la position traditionnelle qui réduit l’acte administratif à l’acte unilatéral est une erreur. En effet, une part de l’activité juridique de l’administration est occupée par les contrats qui bénéficient d’un développement spectaculaire. L’exécution d’un contrat, étant, pour chacune des deux parties, la réalisation des obligations que le contrat met à leur charge.
Le cas de l’acte unilatéral comme celui du contrat administratif est marqué par une inégalité. D’un coté l’administration, de l’autre l’administré ou le cocontractant. En effet l’administration, parce qu’elle agit au nom de l‘intérêt général, dispose de prérogatives exorbitantes de droit commun. La vision du profane, évoquée plus haut, n’est pas sans fondement.
Toutefois, nombreux ont été les textes tendant à renforcer les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
- Par exemple, le Décret n°83-1025 du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l’administration et les usagers, ou encore,
- la Loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
Ainsi, à l’heure du tempérament de la relation inégalitaire entre l’administration et d’une part l’administré et d’autre part le cocontractant, quelle est l’effectivité de la possibilité de ses derniers de faire face à l’exécution d’un acte administratif ?
Le contentieux administratif est marqué par une diversification des moyens d’empêcher l’exécution d’un acte unilatéral ouverts aux administrés(cf article à venir), ainsi que par une possibilité moins restreinte d’empêcher l’exécution d’un contrat administratif (cf article à venir).